C’ÉTAIT HIER... A FIGEAC
par Guy Chassagnard
Ouvrage paru en 2019
252 pages - Aux Éditions Segnat
Diffusion : Amazon.fr
Prix TTC : 16,50 €
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LES PREMIÈRES PAGES
La fondation
Il y a bien longtemps se dressait dans le frais vallon de Lunan, ou dans un vallon voisin, qu’importe, un petit monastère dépendant de la grande et célèbre abbaye de Conques ; dont les moines n’étaient pas, loin s’en faut, malgré le recueillement et la prière, pleinement heureux. Le ruisseau qui coulait au pied des murs avait, en effet, des humeurs redoutables. Il en résultait force inondations pour les biens et rhumatismes pour les religieux… Si bien que ceux-ci aspiraient à vivre en d’autres lieux, à seule fin de pouvoir mieux méditer en paix.
L’abbé du monastère, un certain Anastase, plaça donc le bonheur de ses bons moines au centre de ses aspirations. Un jour de promenade et de méditation, Dieu lui-même s’en vint au secours du saint homme. Un vol de tourterelles se leva soudain devant Anastase et, après avoir dessiné dans l’azur du ciel une grande croix blanche, se posa sur la rive paisible du Célé. L’emplacement d’un nouveau monastère venait d’être trouvé.
Restait à l’abbé le soin de dresser l’édifice. Ne disposant point de l’argent nécessaire, celui-ci s’en alla à la rencontre du roi Pépin qui s’en revenait d’Espagne. Le souverain nourrissait alors le projet de rendre gloire à Dieu pour de récentes victoires militaires. Un roi, un abbé, un lieu consacré, un monastère… Il n’en fallait pas plus pour fonder la ville de Figeac.
– Fiat ! - s’écria le roi Pépin, que l’on surnommait peut-être le Bref , mais plus certainement d’Aquitaine. Que cela soit !
– Fige illac ! - Mets-le là ! entendirent ceux qui l’accompagnaient. Fiacus - Figeac, écrivirent les clercs royaux chargés de dresser l’acte de fondation monastique.
Le roi Pépin dota richement le nouveau monastère qui se vit ainsi confier pour la purification des âmes et la conversion des infidèles : un morceau de la sainte crèche, des lambeaux de linges du Christ, des grains d’encens offerts par les rois mages, des miettes du pain ayant servi à nourrir les foules dans le désert, enfin des cheveux de la vierge Marie…
Fiat ! - Je le veux...
La fondation de Figeac vue par l’abbé Jean-François Debons, qui fut chanoine de la collégiale locale avant la Révolution et curé de Saint-Sauveur sous l’Empire :
Il y avait peu de temps que Pépin le Bref avait subjugué Hunaut, duc d’Aquitaine, qui s’était révolté contre lui, refusant de le reconnaître pour souverain, lorsque les religieux de Lunan, lui ayant exposé les dangers qu’ils couraient dans cette vallée, lui demandèrent l’agrément de s’éloigner du Lot, et de se fixer près la rivière du Célé, dont les inondations, moins à craindre, par sa petitesse et la situation du lieu, ne les exposeraient pas aux mêmes désastres.
Pépin, qui avait beaucoup de piété et qui voulait témoigner à Dieu sa gratitude pour les triomphes qu’il lui avait accordés sur les Sarrasins, se prêta volontiers aux vues des moines de Lunan. Il répondit, selon toute apparence, à leur demande, par le mot «fiat », je le veux, et, probablement, cette réponse donna le nom de «Fiat » au nouveau monastère qui y fut construit…
Restait au pape Étienne II, en visite en Guyenne avec le roi Pépin, à consacrer le lieu :
« Ils arrivèrent à Figeac le 6 novembre 754. De suite on disposa toutes choses pour la grande cérémonie qui devait commencer le lendemain. Le pape s’étant revêtu des habits pontificaux, se rendit le soir, avec toute sa suite, à la porte de l’église.
« Une nuée en dérobait l’entrée, des chants mélodieux se faisaient entendre, et une odeur suave se répandait de toutes parts, ce qui remplit d’admiration, non seulement le roi et le pape, mais encore tous les assistants, qui furent autant de témoins de ce prodige.
« Ce ne fut que vers les neuf heures du matin que cette nuée se dissipa, et que le souverain Pontife y entra. S’approchant de l’autel, il trouva les empreintes de la croix et de l’onction sainte, faites par une main invisible, ainsi qu’en différents endroits des piliers et des murailles, de la même manière que l’Église le pratique dans la consécration des édifices élevés au vrai dieu. Le pape jugea à propos de ne pas faire d’autre cérémonie que d’y célébrer le redoutable sacrifice de notre rédemption. Il y donna donc la messe, et dédia l’église et le monastère à la sainte Trinité.
« Et depuis, tous les ans, on en a célébré la fête, le premier dimanche après la Pentecôte, ainsi que celle de la Dédicace, le 8 novembre, jour du prodige dont nous avons parlé. »
La légende dorée
Jules Malrieu, qui fut, au début du XXe siècle, président du tribunal de Figeac, adjoint au maire, président des Amis du Vieux-Figeac et, à ses moments perdus, félibre occitan, a dédié ce poème à la Légende dorée de l’abbaye de Figeac :
Voila plus de mille ans que l’eau de ta rivière
Pour la première fois entendant la prière
Des moines qui, pieds nus, défrichèrent ses bords,
Surprise, vint mêler, de vêpres à mâtines,
Ses notes argentines
Aux chants des hosannas et des hymnes des morts.
Car le Célé coulait tout près de l’oratoire
Qu’avaient construit, d’après ce que nous dit l’histoire,
Les moines de Lunan ; le murmure des eaux
Courant sur les cailloux, rythmait les homélies,
Et psaumes et complies
Que scandaient la cigale et les cris des oiseaux.
Mais, déjà, de ton sol on creusait les entrailles
Pour reposer le poids des puissantes murailles
Que l’on croyait bâtir à toute éternité,
Dont il ne reste plus que quelques pans de pierre
Sous l’herbe et sous le lierre,
Vénérables lambeaux des flancs de la Cité !
Et ce fut comme un jet de jeune et forte sève
Faisant pousser la vigne et la moisson qui lève
Aux pentes des coteaux, qui fit, presque à la fois,
Surgir, forêt de pierre, églises et chapelles,
Et clochers et tourelles,
Montant dans le ciel bleu de la rougeur des toits !
Là haut, près des remparts, comme une forteresse
Faisant corps avec eux une église se dresse
Dominant l’horizon et la ville à ses pieds ;
Éternelle vigie au bout de la montagne,
Surveillant la campagne,
Annonçant le péril aux bourgeois assiégés !
C’est l’église du Puy, la première paroisse
Qui, dans ce temps ancien d’épouvante et d’angoisse,
Aux mendiants, aux gueux, au voyageur lointain,
Au pâtre, au laboureur, sut donner pour asile,
Au sommet de la ville,
Le haut quartier du Clau, de Figeac l’Aventin ;
Le Clau, réseau serré de malpropres ruelles,
Aux maisons en torchis dont les frêles poutrelles
Défendaient mal, l’hiver, de la neige et du froid ;
Repère des truands, cloaque de la plèbe
Et des serfs de la glèbe,
Où les archers du guet n’entraient pas sans effroi.
FIGEAC AU TEMPS JADIS
Vieille charte figeacoise;
La place Carnot au début du XXe siècle.
La place Champollion.
Saint-Sauveur et l’obélisque de Jean-Frannçois Champollion.
Le pont Gambetta, sur le Célé.
Vieil escalier en bois à découvrir au fond d’une cour.
La rue Malleville, en 1905.;
La rue Orthabadial, au XIXe siècle ; l’édifice (de gauche) est devenu, de nos jours, Office de tourisme.
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